Le racisme à venir



Extrait de la conférence du poète et philosophe
Jorge Ángel Livraga Rizzi(1930-1991)

«Le racisme à venir » Paris - Octobre 1989
(dessin: Michel Kichka)

Dans le racisme à venir, tout est encore très trouble car il n'existe pas de véritables idéaux de civilisations. Et dans le désastre qui nous menace, se trouvent confondus des éléments millénaires avec des éléments actuels et même des éléments relevant du futur. Ce qui est clair, c'est que devant l'échec des systèmes, la moitié du monde mourant de faim, le retour du fanatisme pseudo-religieux, on cherche à tout prix des "boucs émissaires".

Je crois que nous avons fait du monde un écheveau d'une incroyable confusion et que nous nous empoisonnons la vie inutilement. Nous devons apprendre à vivre et à laisser vivre. Dans notre petit "laboratoire" de l'Organisation Internationale Nouvelle Acropole, qui a des sièges dans cinquante pays, nous avons pu confier des postes de très haut niveau et de responsabilité à des personnes d'origine juive, chrétienne (des différentes sectes), musulmanes et shintoïstes ; leur peau - bien qu'en vérité je n'y ai jamais fait attention - est blanche, jaune ou sombre.

Quel est le secret de ce succès ?

Il est très simple. Nous avons mis l'Homme au-dessus de l'homme, c'est-à-dire la partie spirituelle et noble sur la partie matérielle et grossière. Il n'a pas été massifié. La valeur d'un homme, d'une femme est faite de ce qu'ils sont vraiment et ne dépend ni de la couleur de leur peau ni de l'endroit où le destin les a fait naître. Et ce lieu de naissance est très important, car un enfant qui, par exemple, naît en Espagne, sera mené sur les fonts baptismaux catholiques alors qu’il n'a que quelques jours, sans pouvoir choisir ni donner son avis ; si vingt ans plus tard, en faisant appel à sa raison et à sa culture, il préfère une autre religion, ou aucune, il sera apostat. Et c'est la même chose pour les autres religions. Pourquoi ? Parce que l'on ne respecte pas la liberté de l'individu, que l'on considère comme n'étant qu'un simple élément mécanique d'une "société de coutumes". C'est, dans le fond, une forme de peur, un racisme spirituel.

Derrière tout racisme se cache une peur. Si un nouveau racisme nous menace, c'est que nous avons rendu un culte à la peur et à la faiblesse. Des millions d'enfants ne jouent plus avec leur corps, se donnant et recevant des coups et des caresses salutaires, mais demeurent statiques, hébétés face à un appareil de télévision, à regarder ce que font les autres. Nous sommes en train de construire une culture de voyeurs, de simples observateurs incapables de penser et de sentir par eux-mêmes.

Le racisme à venir s'alimentera de cette chair sans feu et de ces âmes sans Vie, car, ne l'oublions pas, le racisme est lié à la peur, c'est vivre à l'extérieur de soi-même, c'est être superficiel.

Si nous nous tournons vers l'intérieur de nous-même et si nous reconnaissons l'existence naturelle des sexes, des races, des ethnies et des opinions différentes, nous parviendrons à la véritable liberté ; et, là où existe une véritable liberté, le racisme n'a pas sa place, pas plus qu'aucune autre manière fanatique d'envisager l'existence.




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